EGYPTE-COP 27: l’Afrique victime de la pollution des grandes puissances
CHARM EL-CHEIKH, 7 NOVEMBRE (ASPAMNEWS)–Alors que 110 chefs d’Etats sont attendus lundi et mardi à la tribune de la COP, Emmanuel Macron est arrivé ce matin à Charm el-Cheikh. Lors d’une rencontre avec des militants écologistes, le président français a appelé la Chine et les Etats-Unis à payer leur part pour aider les pays vulnérables face au changement climatique. L’un des enjeux du sommet sera de réussir à faire payer les pays riches pour les «pertes et dommages» subis par les pays en développement, en première ligne face aux conséquences inévitables du changement climatique.
À l’occasion de ce rendez-vous consacré à l’urgence climatique, le Président de la République Macky Sall a invité les grandes puissances à assumer leurs responsabilités. “Assurément, le temps ne doit plus être aux promesses, mais à l’action pour sauver la planète, notre habitat commun, a invité le Président en exercice de l’Union africaine. Nous sommes disposés à travailler avec tous les partenaires pour que la COP de Sharm el Sheikh ne soit pas un constat de plus sur le péril climatique, mais une action de plus en faveur du climat, dans l’intérêt des générations actuelles et futures”.
Macky Sall a surtout invité l’auditoire au respect des engagements pris notamment auprès des pays en développement qui subissent de plein fouet les conséquences du dérèglement climatique : “Faire l’histoire, en tenant nos engagements, tous nos engagements, dont celui convenu de 100 milliards de dollars par an pour soutenir les efforts d’adaptation des pays en développement, et qui peine à être réalisé. Subir l’histoire, en ignorant le principe de responsabilité commune mais différenciée, qui veut que ceux qui polluent le plus paient le plus, pour aider à sortir la planète de son état d’urgence climatique”.
Le chef de l’État sénégalais a, par ailleurs, souligné que l’Afrique jouera pleinement son rôle pour la sauvegarde de la planète : “L’Afrique est venue au rendez-vous de Sharm el Sheikh dans un esprit de participation responsable au sauvetage de la planète ; résolue à faire l’histoire et non à la subir.”
Ce sont des centaines de petits jets privés et de gros avions présidentiels qui vont traverser le ciel africain, venant de tous les coins de la planète, pour déverser leurs occupants dans la belle cité balnéaire de Charm el-Cheikh, en Egypte. Au pays des pharaons qui accueille, depuis ce dimanche 6 novembre, la 27è conférence sur le climat, c’est-à-dire la COP 27 pour suivre la mode des gens qui luttent contre le réchauffement climatique, ceux qui nous dirigent, essaieront, une fois encore, de trouver les mots les plus durs pour condamner la production excessive des gaz à effet de serre qui continuent de détruire la couche d’ozone protectrice de «la maison commune». Mais, ils penseront aussi aux casiers où seront rangées les grandes annonces tonitruantes qui seront accouchées par ce sommet égyptien, le énième pour sauver la terre au profit des générations futures.
Certes, quelques résultats sont avancés avec beaucoup d’emphase et de publicité lors des plénières et travaux en commission interminables, mais permettent difficilement de rattraper les pas de géants faits par les puissants de ce monde dans la course à l’industrialisation.
Sauf que la Chine, les Etats-Unis, la Russie, l’Inde, la France, la Corée du nord, pour ne citer que ces pays, car le chapelet peut être égrené encore, ont fini de montrer leur incapacité à mettre en pratique les décisions nobles, justes et importantes issues de ces rencontres. Ainsi, ces grands-messes se suivent et se ressemblent par l’inaction après les longues nuits de discussion pour parvenir aux accords les plus merveilleux sur papier.
Comment donc expliquer à la petite vendeuse du coin de la rue à Gao, au Mali, elle qui assure, toute seule, les frais de scolarité de ses trois enfants dont le père est descendu dans les mines d’or artisanales, que tous ces avions qui vrombissent au-dessus de sa tête, en partance pour la COP 27, polluent moins l’environnement que le bois de chauffe de 200 FCFA, qu’elle achète chaque matin pour la cuisson de ses gâteaux? Comment convaincre Ibra, le chauffeur que son taxi vert qui lui permet de s’occuper de sa famille africaine, qui s’étend de la ville au village, et est à peine visible à 20 mètres dans la circulation de Ouagadougou, au Burkina, tant le véhicule est couvert par l’épaisse fumée noire qui sort du capot qui ne tient que par les fils de fers croisés avec art par le tôlier di garage d’à-côté?
Comment amener les Personnes déplacées internes qui ont fui leurs localités sous la pression terroriste, à comprendre que les moyens colossaux qui sont engloutis par l’organisation de ces sommets aux résultats dont aucun compte n’est tenu dans la pratique, doivent prendre le pas sur l’équipement et la formation des armées des pays du Sahel engagées dans la guerre asymétrique que leur imposent les terroristes et autres hommes armés non identifiés, les fameux HANI? Pourtant, c’est l’Afrique, où tout est priorité, de la santé à l’éducation en passant par la nourriture, qui paie le tribut le plus lourd à la pollution de la planète dont les auteurs sont pourtant au nord. Et connus!
En conclusion, et il ne faut pas avoir peur des mots, le monde des soldats de l’environnement, peut peu, contre le réchauffement inexorable de la planète. En tout cas, tant que la course effrénée aux richesses sera d’actualité, et que le pollueur ne paiera jamais ses factures.
La France, à travers son président, a tenté de jouer les bons élèves. Arrivé au sommet de l’ONU sur le climat à Charm el-Cheikh, le président a assuré que l’Europe et la France étaient sur la bonne «trajectoire» pour tenir leurs «objectifs» de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Face à des jeunes militants pour le climat qui l’interpellaient sur son engagement en faveur de l’écologie, Emmanuel Macron a déclaré : «Je suis comme vous, je n’aime pas les énergies fossiles». Mais «on dépend à mort des énergies fossiles», «c’est pas vrai qu’on va en sortir en six mois», a-t-il ajouté. Anne Bringault, du Réseau Action Climat, note de son côté que les émissions de gaz à effet de serre de la France, pourtant condamnée pour «inaction climatique», sont toujours «loin» de «la bonne trajectoire». «Plusieurs mesures néfastes pour le climat ont été prises depuis le début de ce quinquennat», a-t-elle affirmé, évoquant la réouverture de la centrale à charbon de Saint-Avold ou encore un projet de nouveau terminal méthanier au Havre.
Mais Greenpeace réagit aux propos d’Emmanuel Macron. «La France devrait tout faire sauf se poser en donneuse de leçon», lance Clément Sénéchal ce lundi sur franceinfo. Le porte-parole climat de Greenpeace France réagit vivement aux propos du président français, qui a affirmé vouloir «mettre la pression sur les pays riches non européens pour leur dire de payer leur part». Pour Clément Sénéchal, «la France et aucun pays ne devraient venir parler à la tribune des Nations unies, simplement pour rejeter la faute» sur les autres pays. D’autant que la France est loin de respecter ses promesses en matière de lutte contre le dérèglement climatique.
Une chose est certaine, c’est que La COP27 s’est ouverte avec une nouvelle alerte. Le réchauffement climatique s’accélère. Si les projections pour cette année se confirment, les huit années de 2015 à 2022 seront les plus chaudes jamais enregistrées, a alerté dimanche l’Organisation météorologique mondiale (OMM) dans un rapport qui tient plus d’une «chronique du chaos climatique». «Alors que la COP27 commence, notre planète envoie un signal de détresse», s’est alarmé le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres dans un message vidéo diffusé à Charm el-Cheikh.
Avec une température moyenne estimée de 1,15 °C supérieure à celle de l’ère préindustrielle, l’année 2022 devrait se classer «seulement» à la cinquième ou sixième place de ces années les plus chaudes, en raison de l’influence inhabituelle, pour une troisième année consécutive, du phénomène océanique La Niña qui entraîne une baisse des températures. «Mais cela ne renverse pas la tendance de long terme ; c’est seulement une question de temps avant qu’il y ait une nouvelle année plus chaude», a insisté l’OMM, agence spécialisée de l’ONU.
Malgré des engagements internationaux encore insuffisants (mais qui progressent) pour contenir le réchauffement sous la barre des 1,5°C ou maximum 2°C, l’objectif de l’Accord de Paris ne doit pas être perdu de vue. Antonio Guterres a appelé les gouvernements, notamment ceux des Etats du G20, mais aussi acteurs privés et institutions financières à «combler l’écart» entre les engagements, qui mettent l’humanité sur une trajectoire d’au moins +2,6°C, et ce qui serait nécessaire pour respecter l’accord de Paris. La finance climat, pour organiser la solidarité Nord-Sud, va aussi être un enjeu majeur.
En 2009, les pays riches ont promis de consacrer collectivement 100 milliards de dollars par an, au plus tard en 2020, pour aider les pays pauvres. Cela n’est toujours pas le cas. Les pays les plus vulnérables réclament en plus un financement spécifique pour compenser les «pertes et dommages», soit les conséquences irréversibles du changement climatique, qui pourraient atteindre 580 milliards de dollars par an d’ici 2030 dans ces pays. (SPM/2022)
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