RIO DE JANEIRO, 31 OCTOBRE (ASPAMNEWS)- L’homme qui a été président du Brésil de 2003 à 2011 a été encore élu dimanche 30 octobre 2022 au deuxième tour de la présidentielle dans ce pays, avec 50,9 % des suffrages face au sortant d’extrême droite Bolsonaro.
Le dirigeant de gauche Luiz Inacio Lula da Silva a été élu dimanche pour un troisième mandat à la tête du Brésil, distançant d’une très courte tête le président sortant Jair Bolsonaro qui cinq heures après l’annonce officielle des résultats n’avait toujours pas reconnu la victoire de son rival honni.
Le président élu a obtenu 50,90% voix contre 49,10% pour Bolsonaro, soit un peu plus de deux millions de voix d’avance sur 156 millions d’électeurs. Il s’agit de l’élection la plus serrée de l’histoire du Brésil depuis le retour de la démocratie en 1985, après vingt-et-un an de dictature militaire, illustrant l’implantation du bolsonarisme, appelé à survivre à la défaite de son chef.
«C’est une démonstration de force de la démocratie brésilienne, face aux attaques dont elle est victime depuis bientôt quatre ans», a résumé l’éditorialiste vedette de TV Globo Miriam Leitão, ancienne prisonnière politique sous la dictature militaire et à ce titre, cible privilégiée de Jair Bolsonaro.
Démonstration également de la résilience de Lula da Silva, élu, certes sur le fil face au sortant, mais élu quand même, malgré la mobilisation d’une ampleur inédite des moyens de l’Etat au service de la candidature présidentielle : réduction à marche forcée du prix des carburants, versement d’allocations aux plus démunis, aux chauffeurs de taxi et aux routiers (deux de ses assises), intimidations de toutes sortes, comme ces contrôles de la police des routes qui se sont multipliées en plein scrutin dans ce qui a été perçu comme une tentative, infructueuse, selon le président du Tribunal supérieur électoral, de décourager les électeurs d’aller voter. Ou encore, ces pressions inédites d’employeurs sur leurs salariés, sommés de voter Bolsonaro sous peine de perdre leur emploi.
A peine proclamé vainqueur, le leader de gauche s’est montré à la hauteur du défi qui l’attend : réunifier un pays fracturé. «Il n’y a pas deux Brésils, nous sommes un seul et unique pays, un seul peuple, une grande nation», a déclaré Lula, promettant de «gouverner pour tous, riches et pauvres, gauche et droite». «Il est temps de baisser les armes», a-t-il ajouté.
Depuis le retour au suffrage universel, en 1989, après une longue dictature (1964-1985), aucune élection n’aura été aussi serrée. Lula l’a remportée par 50,9 % des suffrages exprimés, contre 49,1 % pour le sortant, qui devient le premier président à ne pas décrocher un second mandat depuis 1997, quand la réélection a été inscrite dans la Constitution.
Soit un écart d’à peine un peu plus de 2 millions de votes (sur 156 millions d’électeurs) qui s’est considérablement resserré en faveur de son adversaire, depuis le premier tour du 2 octobre. Le patron du Parti des travailleurs (PT), qui avait déjà gouverné le Brésil pendant deux mandats, entre 2003 et 2010, est également le premier président de l’histoire républicaine du Brésil à se faire élire une troisième fois. Pas de doute, Lula est un mythe.
Le plus vieux président du Brésil
Lula retrouve le palais présidentiel du Planalto douze ans après avoir quitté le pouvoir. Quand il prendra ses fonctions, le 1er janvier, il sera à 77 ans le plus vieux président de l’histoire du Brésil. Il a déjà annoncé que cette sixième candidature sera la dernière. «Maintenant, je veux voter pour d’autres», a-t-il dit dimanche.
L’ancien ouvrier métallo et leader syndical, né dans la misère dans le Nordeste, aura eu un destin exceptionnel et marqué un demi-siècle de l’histoire du Brésil. Qui imaginait que, condamné pour corruption, il reviendrait trois ans plus tard à la présidence ? «Le Nordestin qui a survécu à la faim ne craint rien», avertissait Lula en recouvrant la liberté après 580 jours en prison.
À l’issue d’une soirée pleine d’émotions et de suspense, la victoire de Lula a été saluée par des explosions de joie dans les grandes villes du pays. Des foules en liesse étaient descendues dans la rue avant même l’annonce officielle, des cris «c’est Lula» ont fusé, pétards et feux d’artifice ont éclaté, des concerts de klaxon ont retenti. L’avenida Paulista, les «Champs Élysées» de Sao Paulo, était dès la fin de l’après-midi noire de monde.
À Rio de Janeiro, c’était la fête sur la grande place de Cinelandia, dans le centre, où des milliers de personnes se sont retrouvées pour célébrer la victoire de Lula. «Il fallait que je sorte dans la rue pour faire la fête. Je suis soulagée mais avec la peur que Bolsonaro n’accepte pas le résultat», dit Luiza Donner, 32 ans, dans un bar rempli de partisans de Lula, dans le quartier de Leme, près de la célèbre plage de Copacabana. À quelques dizaines de mètres seulement, dans un bar de supporters de Bolsonaro, l’agent immobilier Jose do Santos porte un tee-shirt vert et jaune. «Je suis démocrate, je vais respecter le verdict des urnes mais la défaite de Bolsonaro va apporter énormément de problèmes au Brésil», dit-il, en citant le Venezuela et l’Argentine. (SPM/2022)
Les commentaires sont fermés.